Quand les dernières heures du jeune homme malade arrivaient, tous les membres de la Congrégation des Jeunes étaient invités à vivre ce moment entre eux, dans la solidarité. Les cloches de l’Eglise paroissiales sonnaient pour indiquer que quelqu’un était en train de mourir.
Art 48. Dès qu’on entendra sonner l’agonie, tous les Congréganistes qui n’en seront pas empêchés, se rendront aussitôt à l’église, le cœur navré de douleur, pour y assister aux prières que M. le Directeur fera lui-même.
Ceux qui prenaient soin du jeune mourant étaient unis avec ceux qui étaient dans l’église.
Art 49. Tandis que les congréganistes, d’une part, assistant à l’église aux prières des agonisants, les infirmiers, d’autre part, resteront auprès du malade pour réciter les mêmes prières.
Statuts XIV, §2 Envers les congréganistes malades
Ce geste de communion avec les frères absents est l’une des caractéristiques de la prière d’Eugène – en particulier pendant les moments d’oraison (voir les entrées du 15 et 16 novembre 2011).
À Aix, les cloches sonnent tristement, un Congréganiste va mourir. Comment vivre, pour des jeunes gens unis dans un cheminement qui porte en lui tant de promesses, l’approche de la mort d’un compagnon?
La mort, humainement inacceptable pour tous, doit l’être davantage encore chez ces garçons remplis d’enthousiasme.. Parler d’acceptation est de prime abord impensable. Comment accepter en effet le décès d’un ami lorsqu’on est à l’âge des projets les plus fous, celui aussi où les liens d’affection semblent faits pour durer toute une vie ? L’apathie peut briser tout élan vital. L’incompréhension peut s’installer avec son lot de révolte et de désespérance. Tant de réactions extrêmes que connaissent également bien des jeunes désemparés d’aujourd’hui…
Eugène de Mazenod connaît ses enfants. Sans nier leur chagrin bien légitime devant la mort, il les invite à ouvrir leur « cœur navré de douleur» dans une prière authentique. N’est-ce pas la prière qui plaît à Dieu que celle où la peine va s’exprimer librement ?
Rien de magique dans cette prière des Congréganistes, aucune demande désormais irréaliste. Mais la foi en Jésus Sauveur capable d’apporter au mourant et à ses enfants le réconfort de l’amitié bien réelle et l’acceptation d’une mort qui n’aura pas le dernier mot.
C’est le même Eugène qui écrira bien des années plus tard : « Trouvons-nous ainsi souvent ensemble en Jésus Christ, notre centre commun en qui tous nos cœurs se confondent et toutes nos affections se perfectionnent». (*)
Une communion à vivre pour chacun de nous et à travers laquelle nous prendrons de plus en plus conscience de notre appartenance commune d’enfants de Dieu. Celui que le Christ nous a appris à prier en disant : « Notre Père… »
Peut-on douter que notre commune-union en Jésus pourra apporter du réconfort à ceux qui souffrent et réveiller en eux la douceur de se savoir aimés. ?
(*) http://omiworld.org/dictionary.asp?v=10&vol=1&let=C&ID=1089