Dans une réflexion précédente, Eugène écrivait au Supérieur, chargé de la formation, à propos du Frère Saluzzo qui doutait de sa vocation. Eugène, ci-dessous, écrit directement au jeune homme :
… vous me témoignâtes votre contentement lors de mon passage à Billens. Tout à coup vos dispositions changent et les raisons que vous alléguez sont si pitoyables que nul homme de bon sens n’eût pu s’y arrêter le moins du monde. Cependant, il ne s’agissait de rien moins que de renoncer à votre vocation. …
Maintenant vous persistez dans votre infidélité. La sentence que Notre Seigneur a prononcée d’avance sur ceux qui regardent en arrière, après avoir mis la main à la charrue, ne vous effraye pas, quoique les raisons que vous alléguez soient à peu près de la même trempe que celles qui ne sauvèrent pas le jeune homme de l’Évangile de la malédiction du Sauveur. C’est un très grand malheur, mais il n’est pas en notre pouvoir de l’empêcher; nous déplorerons votre perte, mais nous en serons innocents devant Dieu quand nous aurons fait tout ce que nous aurons pu pour vous détourner d’une résolution évidemment inspirée par l’ennemi de votre salut. Je consens donc que vous quittiez Billens, que vous vous sépariez de ces anges dont la seule présence était une sauvegarde pour votre faible vertu. Vous viendrez d’abord à Notre-Dame du Laus pour vous placer jusqu’à nouvel ordre sous le manteau de notre Bonne Mère. C’est la dernière ressource que j’emploie pour vous sauver. Venez-y avec un cœur droit, invoquez-y avec ferveur cette puissante protectrice, demandez-lui d’accorder au guide que je vous indique dans ce saint lieu les lumières d’en-haut et, à vous, la simplicité et la docilité dont vous avez besoin dans cette circonstance décisive de votre vie.
Au Frère Saluzzo, le 8 décembre 1831, EO VIII n 411
Retournement de situation : Frère Saluzzo, sorti de la Congrégation, manifeste le désir d’y revenir. À tout péché miséricorde : Eugène de Mazenod l’accueille avec bien des réticences. Il évoque le jeune homme de l’Évangile et son attachement aux biens de ce monde. « Le jeune homme s’en alla, tout triste, car il avait de grands biens… » (Matthieu 19).
« Je consens donc que vous quittiez Billens… Vous viendrez d’abord à Notre-Dame du Laus pour vous placer jusqu’à nouvel ordre sous le manteau de notre Bonne Mère » écrit le fondateur. Et d’évoquer la simplicité et la docilité qui devront habiter le frère rentré au foyer.
Des conseils pertinents d’Eugène, je préfère en demeurer à la dévotion de la Congrégation envers Marie Immaculée et me rappeler que les Missionnaires se sont réellement placés sous l’aide de la Sainte Mère de Dieu. Bien loin de la mièvrerie apparente, ils ont vu la force de la jeune fille qui a misé sur un oui dont elle ne savait à quoi il allait aboutir et la fidélité de celle qui a accompagné son fils jusqu’à la fin. De ces qualités les Missionnaires oblats auront besoin pour passer à travers les difficultés dans un pays au climat politique bouleversé. Peut-être aussi Fr Saluzzo pourra-t-il s’en inspirer.
« Sainte Marie… prie pour nous… » Et la Vierge accourt aider ceux qui ont besoin de secours.