Une fois qu’Eugène eût choisi quels Oblats allaient participer à la mission paroissiale d’Allauch, un membre de la communauté demeura désappointé de ne pas avoir été choisi dans l’équipe. Eugène lui écrivit :
Soyez sans inquiétude, ce qui est différé ne sera pas perdu et dès que je pourrai combiner une mission dont vous puissiez faire partie, je ne vous oublierai pas.
Eugène rappelle alors à cet Oblat récemment ordonné prêtre que la mission oblate est un effort de groupe, et que tous ceux qui demeurent à la maison participent encore au ministère actif des autres par le biais de leur solidarité :
En attendant, nos Pères travaillent à votre profit et pour votre compte comme pour le leur, car tout est solidaire chez nous, comme vous savez.
Lettre à Bernard Vachon, 22 novembre 1824, EO VI n 158
Et dans notre Règle de Vie oblate :
C’est dans la communauté à laquelle nous appartenons et par elle, que nous accomplissons notre mission.
CC&RR, Constitution 37.
« L’engagement individuel à l’effort d’un groupe – voilà ce qui permet à un groupe, une compagnie, une société, une civilisation d’opérer. » Vince Lombardi
Novembre 1824. On ne connaît que trop bien le désappointement d’avoir mis tous ses rêves dans la réalisation d’un projet et de le voir confié à d’autres. Ainsi en est-il du P. Bernard Vachon qui ne fera pas partie de l’équipe pour la mission d’Allauch.
Il arrive qu’une telle frustration, vécue dans le silence, conduise au repli sur soi. Bien en a pris au jeune missionnaire de s’en ouvrir à Eugène de Mazenod. «Soyez sans inquiétude, ce qui est différé ne sera pas perdu », lui répond celui-ci en l’assurant qu’un jour viendra où ses services seront à leur tour requis. Venant du Fondateur, voici une promesse qui vaut son pesant d’or !
Plus précieux encore l’enseignement qui suit ! Précieux, et pour le P. Vachon, et pour nous tous qui évoquons la communion des saints sans en saisir vraiment toute la portée. «En attendant, continue Eugène, nos Pères travaillent à votre profit et pour votre compte comme pour le leur, car tout est solidaire chez nous, comme vous savez. »
Comme c’est simple dans la foi ! Et comme cette réalité nous échappe souvent ! Blaise Pascal avait compris bien avant nous la manière de se comporter quand tout ne se passe pas selon nos désirs. «L’homme n’est ni ange ni bête, écrivait-il, et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la bête. »
Nul d’entre nous ne désire « faire la bête ». Il nous reste donc à prendre les déconvenues qui se présentent en humains que nous sommes, à leur permettre de s’exprimer en nous et à nous en ouvrir à une personne de confiance.
Dans un second temps, un conseiller avisé, pourra, comme le Fondateur l’a fait pour le P. Vachon, replacer les choses dans leur perspective évangélique. Là où Jésus choisit ceux qu’il envoie et où tous rendent grâce pour les merveilles accomplies par Dieu à travers leurs différents ministères.