Eugène insistait sans cesse sur sa conviction que les missionnaires devaient être les instruments par lesquels le Sauveur parlait.
Je n’ai pas besoin de vous dire avec quel plaisir j’ai lu et relu à d’autres votre relation. On peut dire que votre coup d’essai a été un coup de maître tant le bon Dieu a béni vos efforts. Il en sera toujours ainsi quand vous mettrez toute votre confiance en lui.
C’est son œuvre que la conversion des âmes, elle ne peut être obtenue que par la grâce de Jésus-Christ, et cette grâce ne se communique qu’aux humbles, à ceux qui s’oublient eux-mêmes pour renvoyer toute la gloire à Dieu.
D’où vient la différence des fruits que produisent les prédications du pauvre missionnaire comparés à la nullité des résultats de la plupart des prédicateurs de carême. Visons toujours à l’utile, ne cherchons que la gloire de Dieu et le salut des âmes, estimons-nous heureux d’avoir été choisis pour être les instruments de la miséricorde de Dieu, et le Seigneur fera tout à notre grande consolation.
Lettre à Marc L’Hermite, le 10 janvier 1852, E.O. XI n. 1096.
Prier, ‘c’est s’imprégner de la présence de Celui-là dont on désire être le témoin’.
Loin du prophète à l’attitude mièvre présenté par une certaine imagerie, j’aime voir en Jésus un jeune homme dans la force de l’âge irradiant le bonheur des Béatitudes. Un bonheur qu’il brûle de partager en-dehors de tout légalisme rigide, dans une miséricorde qui comprend, pardonne et devient le guide d’une vie renouvelée.
Le laisser nous apprendre le Royaume où tous sont appelés sans discrimination, où les humbles ont la première place, où les souffrances tant de l’âme que du corps sont soulagées.
Apprendre ce Jésus qui nous disait les mots pour parler à « son Père et notre Père » tout en sachant se lever contre l’injustice, fustiger les tyrans avec la même fougue dont il défendait les opprimés. Écouter encore le condamné sur la croix implorant le pardon de son Père pour tous ceux-là « « ne savent pas ce qu’ils font… »
Incroyable tâche que de devenir « les instruments » par lesquels un tel Sauveur va se faire entendre ! C’est pourtant ce qui est demandé à tout chrétien…
Humainement il s’agit bien là d’une mission impossible. Des malades s’essayant à en guérir d’autres ! Des pécheurs s’avançant à parler de pardon ! Des révoltés se dressant contre des injustices à qui les hommes ont donné force de loi ! Des inconscients mettant souvent en péril leur propre tranquillité ! Voici en somme un réalisme qui pourrait faire déclarer forfait si la conscience de notre propre faiblesse ne s’appuyait résolument sur le Sauveur qui veut avoir besoin des hommes.
Prier, s’imprégner de la présence de Jésus Christ, accepter de devenir les instruments par lesquels sa miséricorde se révèle… Conscients de nos propres faiblesses, avancer, confiants en la miséricorde divine qui fait dire à saint Paul : « C’est quand je suis faible que je suis fort ».