L’ENFANT EST LE PÈRE DE L’HOMME

L’expression du poète Wordsworth que “l’enfant est le père de l’homme” est le principe qui nous guidera dans cette section de notre étude de la spiritualité Mazenodienne. Afin de comprendre la spiritualité qui nous provient de la spiritualité de Saint Eugène, il est nécessaire de comprendre la racine , la semence de son développement primitif.

Après son séjour au Collège des Nobles à Turin, Eugène et sa famille durent fuir à Venise, perdant ainsi une grande partie de leur avoir. Les trois ans et demi qu’il passa à Venise allaient produire des moments significatifs dans sa croissance et son développement spirituel.

Le pasteur de la paroisse, prenant conscience que la famille ne pouvait se permettre d’envoyer Eugène à l’école et conscient aussi des dangers  que l’ennui pouvait provoquer dans l’adolescent plein d’énergie, organisa une “rencontre fortuite” avec un jeune prêtre qui vivait en face de la maison des Mazenod. Le Père  (”Don” en italien) Bartolo Zinelli. Eugène nous raconte l’histoire :

Un jour je m’amusais à la fenêtre qui donnait en face de la maison de la famille Zinelli. D. Bartolo parut de son côté, et m’adressant la parole, il me dit: «Monsieur Eugène, ne craignez-vous pas de perdre votre temps en baguenaudant ainsi à la fenêtre? – Hélas, monsieur, repris-je, c’est bien à regret, mais que puis-je faire? Vous savez que je suis étranger, et je n’ai pas un livre à ma disposition» C’est là qu’il voulait en venir: «Qu’à cela ne tienne, mon cher enfant, vous me voyez ici précisément dans ma bibliothèque, où se trouvent beaucoup de livres latins, italiens, français même, si vous en voulez.

– Je ne demande pas mieux» lui répliquai-je. A l’instant D. Bartolo détache la barre qui tenait les volets de la fenêtre, et y plaçant un livre dessus, il me le fait passer à travers la petite rue qui nous séparait. Le livre fut bientôt lu, car je lisais toujours avec avidité, et le lendemain mon père me conseilla d’aller le rendre, et de remercier D. Bartolo. Tout cela était prévu.

Bartolo m’accueillit avec la plus grande bonté; il me fit parcourir sa bibliothèque, et je passai de là dans le cabinet où il étudiait autour d’une grande table avec son frère, D. Pietro, qui n’était encore que diacre. «Tous nos livres sont à votre disposition», me dit D. Bartolo. Puis il ajouta: «C’est ici que mon frère et moi étudions: vous voyez là la place qui était occupée par un autre de mes frères que le bon Dieu a appelé à lui. S’il vous était agréable de lui succéder, vous n’avez qu’à le dire, nous nous ferons un plaisir de vous faire continuer vos classes, que vous n’avez pas sans doute achevées.» On peut juger de ma surprise et de ma joie. «Je serai trop heureux, monsieur, et mon père y consentira avec bonheur. – Eh bien! venez dès demain, nous commencerons.»… A partir de cette époque, tous les jours pendant près de quatre ans, je me rendais après la messe auprès de ces maîtres bénévoles.

Journal de l’exil en Italie, EO XVI

Le Père Bartolo a été l’un des plus importants formateurs dans la vie d’Eugène.

Comme nous regardons Eugène, ce n’est pas avec les yeux d’un conteur d’histoires, mais avec la question de savoir comment Dieu travailla par l’entremise des événements et des gens dans sa vie – et permettre d’en être nous-mêmes questionnés dans notre propre vie. Pour moi, l’invitation consiste à rappeler certains des moments de grande importance avec les gens qui ont fait une grande différence dans ma vie de jeunesse – et de réfléchir sur la façon dont Dieu a agi à travers eux pour moi, et de l’en remercier.

FRENCH

“Tout comme l’enfant est le père de l’homme, ainsi les impressions de notre jeunesse demeurent très vivantes à l’âge de notre maturité.”   Gustav Stresemann

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1 réponse à L’ENFANT EST LE PÈRE DE L’HOMME

  1. Denyse Mostert dit :

    À Venise, ‘il était moins cinq’ pour le jeune Eugène désoeuvré. Il a 14 ans. Pour lui, plus d’études, plus de livre, aucun ami. Marie-Rose Joannis et Ninette sont retournées en France. Père et oncles doivent trimer dur pour faire vivre la famille.

    Aurait-il pu résister aux plaisirs vénitiens si le curé de la paroisse n’avait porté attention à sa détresse ? Si M. de Mazenod, n’avait organisé de concert avec lui le ‘complot’ qui allait mettre en présence Eugène et Don Bartolo Zinelli ?

    ‘’Avec si on mettrait Paris dans un bouteille… » dit un vieux proverbe. Et cette rencontre a mis face à face le prêtre, le professeur et le garçon qui n’aspirait qu’à s’instruire. Si l’influence du prêtre semble s’estomper par moments, on sait qu’Eugène se félicitera toute sa vie d’avoir rencontré Don Bartolo.

    Bien difficile pour moi de mettre le doigt sur LA personne susceptible d’avoir orienté ma vie ! Comme si la Providence elle-même avait décidé de me mettre à l’abri ! Merci de tout cœur à mon arrière-grand-mère, à un Tonton Charles qui était un vrai père pour moi, à mes grands-parents qui m’ont élevée, à ma maîtresse d’école, au vieux curé de la paroisse qui savait lire au fond des cœurs et au garçon appelé Pierre avec qui j’ai partagé pendant plus de 50 ans les joies et les difficultés d’une vie commune.

    Tous, ils avaient en commun le goût du devoir joyeux, celui où l’amour vient adoucir ce que la vie peut avoir d’amertume. Leur foi était simple, sans questionnements inutiles. Leur fidélité sans faille. Et tout cela faisait facilement oublier leurs travers de gens ordinaires.

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