En réalisant que les exigences de son travail à Marseille l’avaient conduit à une tiédeur spirituelle, il ne perdit pas espoir. Depuis le jour où Eugène avait été ravi par l’expérience de l’amour de Dieu pour lui, c’est la vertu d’espérance qui le maintint dans les temps difficiles. Sachant qu’il était aimé, il sut qu’il n’allait jamais être abandonné.
Douce espérance qui as toujours fait mon bonheur,
toi qui m’étais si chère parce que tu me faisais apercevoir en Dieu une perfection ravissante
qui me le faisait aimer dans un abandon délicieux
Notes de retraite, Mai 1824, EO XV n.156
“L’espérance ne trompe pas, car l’amour de Dieu a été répandu dans nos coeurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné.” Romains 5:5
En mai 1824, le Vicaire général de Marseille vit à la charnière de deux mondes. Entre les charges très concrètes du diocèse et le soin des Missionnaires de Provence, sa vie spirituelle se retrouve pour ainsi dire à l’arrière-plan. Eugène a peur. Peur des sentiments qu’il découvre en lui et que ce tourbillon d’obligations l’éloigne de plus en plus de son Dieu.
Le temps d’une retraite à la Maison d’Aix va favoriser cette douloureuse introspection. Il est étonnant de découvrir tant de sombres pensées chez cet homme au tempérament de feu. « J’ai besoin de la solitude, j’ai besoin de la régularité, j’ai besoin de l’exemple. Hors de là je m’affadis et mon esprit sans saveur n’est plus bon à rien pour la vie éternelle », écrit-il.
Mais, parce que la foi d’Eugène de Mazenod est inébranlable, ce qui aurait pu n’être qu’un cri de souffrance stérile va se transformer en supplique vers Dieu « qui a toujours fait [son] bonheur ». Eugène n’est pas seul, Dieu est avec lui. Doux-amer au départ, le rappel des grâces du passé peut devenir porte ouverte vers une éclaircie qu’on nomme espérance.
« Que votre cœur ne se trouble pas, a dit Jésus. » Invitation à transformer tant de craintes paralysantes en confiance qui relève. (Jean 14,1)