LES ÉLOGES NE ME FONT AUCUNE IMPRESSION, ILS ME FATIGUENT MÊME

Au cours de sa retraite, la méditation d’Eugène le conduit à examiner ses propres réactions, induites par celles des autres. C’est l’un des textes d’Eugène qu’on hésite à publier au 21e siècle, mais il fait partie de l’image réelle de cet homme du 19ème siècle! Son avis « politiquement incorrect » mis à part, le texte montre qu’il était mal à l’aise avec les compliments exagérés.

Les éloges des femmes ou ceux du peuple ne me font aucune impression, ils me fatiguent même. La raison en est qu’ils les accordent indistinctement et sans discernement.
Je suis peu sensible aussi à ceux des libertins, etc., parce qu’ils sont superficiels, peu sentis, etc. Ce pourrait bien être un effet de l’orgueil chez moi. Il faut que je travaille à être aussi indifférent à ceux des gens foncièrement estimables qu’à ceux des femmelettes, etc. J’aurais fait bien du chemin si j’y parvenais

Notes de retraite, décembre 1814, E.O. XV n.130

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1 réponse à LES ÉLOGES NE ME FONT AUCUNE IMPRESSION, ILS ME FATIGUENT MÊME

  1. Denyse Mostert dit :

    Et voilà qui complète bien la réflexion d’Eugène au sujet des éloges qui lui sont faits. Si certains « [l’exaltent] jusqu’aux nues, il en est d’autres qui ne lui « font aucune impression », soit parce qu’il trouve « sans discernement » ou encore
    « superficiels ». Jusque là il nous est facile de souscrire à cette réaction devant des compliments où la sincérité n’est pas évidente.

    D’autre part en 2010, il est compréhensible d’hésiter avant de publier ce texte qui continue par la classification des flagorneurs éventuels. Eugène les range en trois catégories très nettes, « les femmes… le peuple… les libertins… ». Trois ‘étiquettes’ qui pourraient aujourd’hui faire bondir bien du monde.

    Pour jeter sur ces termes le regard le plus objectif possible, il nous faut revenir à la biographie d’Eugène.« Son père Charles Antoine de Mazenod était président du parlement d’Aix. Sa mère Marie Rose Joannis, d’origine bourgeoise apportait un réalisme pratique et avisé… Cette union marquée par des valeurs sociales complémentaires devait assurer au jeune Eugène tout ce qu’il lui fallait pour une vie confortable et pleine de promesses. » (*)

    S’il est évident que la Révolution de 1789 vient bouleverser la vie de la famille de Mazenod, il n’en reste pas moins que ses membres conserveront toute leur vie les caractéristiques d’une classe privilégiée. C’est donc dans la fidélité envers l’éducation reçue et en se basant sur sa propre expérience qu’Eugène écrit ces propos.

    « Le peuple », il apprend d’abord à le connaître à travers les serviteurs de sa famille, puis ce seront les foules déchaînées de la Révolution, les innocentes victimes du chaos qui règne en France et enfin ces pauvres « spirituels » pour qui la Parole de Dieu enseignée en français reste lettre morte.

    « Les femmes et les libertins », il va immanquablement en cotoyer à son retour d’exil alors que « ses grandes ambitions et prétentions [sont] un mariage avec une jeune femme riche, une position sûre et prestigieuse dans la société, et l’accès aux plaisirs et aux amusements de la belle vie… » (*) .

    Si on tient compte de tous ces éléments, cet extrait à première vue “politiquement incorrect” des notes de retraite 1814, n’est-il pas révélateur d’un homme en authentique recherche de la volonté de Dieu et dont l’esprit analytique très juste va le pousser vers la saine résolution de demeurer « aussi indifférent aux compliments des gens foncièrement estimables qu’à ceux des femmelettes » ?

    Tranposer intelligemment ces termes pour notre époque nous permettra de nous montrer compréhensifs et respectueux devant des mots exprimés avec tant de droiture dans un 19ième siècle si différent de notre monde contemporain.

    (*) http://www.omiworld.org/StEugene/StEugene1.asp?L=2)
    .

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