CES BONNES ŒUVRES, CES ŒUVRES ÉCLATANTES POUR LESQUELLES LES HOMMES ME LOUENT, M’EXALTENT JUSQU’AUX NUES

Les réflexions d’Eugène pendant sa retraite le conduisent à voir qu’il a accompli beaucoup de choses louables dans son ministère à Aix : la prédication aux pauvres en Provençal ;  le succès de sa congrégation de jeunes ; son ministère à la prison ; et sa volonté de donner sa vie à s’occuper des prisonniers autrichiens mourants. Là encore, le danger est de prendre les honneurs pour lui-même au lieu de se voir comme un instrument de Dieu.

Voilà peut-être de quoi se compose mon trésor. Ces bonnes œuvres, ces œuvres éclatantes p[ou]r lesquelles les hommes me louent, m’exaltant jusqu’aux nues, ces œuvres qui, faites uniquement pour Dieu, etc., seraient en effet très méritoires, seraient monnaie de bon aloi p[ou]r l’échanger en expiation, en destruction de mes nombreux, énormes péchés; ces œuvres, par cela seul que d’une manière [p. 5] ou d’autre je veux m’en attribuer une partie de la gloire, se réduisent peut-être à rien, et cela encore dans la supposition qu’elles soient commencées dans les vues qu’il convient, et que l’amour-propre ne soit pas le principal moteur de l’action, car si je n’agissais pour lui et par lui, ces œuvres quelles que fussent leurs apparences ne seraient que des péchés.

Il se tourne vers Dieu dans la prière, demandant la grâce de faire toutes choses pour Dieu.

Oh, bon Dieu! à qui seul appartient l’honneur et la gloire, ne permettez pas ce désordre. Je suis le dernier de vos esclaves, je le dis par conviction, rien ne m’est dû que l’opprobre, je ne veux plus agir que p[ou]r vous, mais uniquement p[ou]r vous. Je serais trop ennemi de moi-même si je pensais autrement. Ce à quoi je ferai une particulière attention, ce sera de ne jamais rien dire qui puisse me faire estimer, qui puisse m’exposer à vouloir m’attribuer quelque chose de cette gloire qui vous appartient.

Notes de retraite, décembre 1814, E.O. XV n.130

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1 réponse à CES BONNES ŒUVRES, CES ŒUVRES ÉCLATANTES POUR LESQUELLES LES HOMMES ME LOUENT, M’EXALTENT JUSQU’AUX NUES

  1. Denyse Mostert dit :

    « Bonnes œuvres (…) et amour-propre» ! Un sujet difficile à cerner quand on a été élevé dans le principe d’une grande humilité et donc dans la crainte de ce monstrueux orgueil dont il faudrait taxer toute trace de satisfaction de soi !

    Dans ses notes de retraite de décembre 1814, Eugène de Mazenod exprime clairement le malaise qu’il vit à ce sujet. De « ces bonnes œuvres, ces œuvres éclatantes pour lesquelles les hommes [le] louent, il craint de vouloir s’« attribuer une partie de la gloire ». D’où sa résolution : « Ce à quoi je ferai une particulière attention, ce sera de ne jamais rien dire qui puisse me faire estimer, qui puisse m’exposer à vouloir m’attribuer quelque chose de cette gloire qui vous appartient. »

    Sans toutefois en être « exaltée jusqu’aux nues », il m’arrive d’être heureuse devant certaines de mes réalisations. Tout en reconnaissant que cette joie est légitime, je ressens pourtant une certaine crainte d’acceuillir tout sentiment d’auto-satisfaction qui pourrait me conduire à l’orgueil.

    Faut-il pour autant ne reconnaître en moi « que cendre et poussière », m’emmurer dans le mutisme d’une étouffante et trompeuse modestie ?

    Inversement, quand l’occasion s’en présente, est-ce que j’ai pour les autres le mot d’authentique appréciation qu’ils méritent et qu’il fait si bon entendre ?

    Pourquoi au contraire ne pas apprendre à partager simplement et joyeusement notre reconnaissance devant l’œuvre de Dieu en chacun de nous ?

    Jadis, Élisabeth a salué sa cousine par des mots de louange. Et l’humble Marie elle-même n’a-t-elle pas exprimé dans un vibrant Magnificat sa reconnaissance envers ce Dieu qui a fait pour elle et pour tout son peuple tant de merveilles ?

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