VOUS POUVEZ IMAGINER QUEL INTÉRÊT J’AVAIS DANS TOUT CELA

Malgré le manque d’intérêt d’Eugène, sa mère et le cousin de sa mère Roze n’abandonnèrent jamais d’essayer de lui trouver la fille riche de leurs rêves. Eugène écrivit à son père au sujet de cet incident:

Hier au soir, quelqu’un vint officiellement parler à ma mère, pour savoir si je n’avais pas l’intention de me marier; qu’il était question d’une demoiselle remplie de bonnes qualités, etc.; more solito, qu’elle apportait en dot le jour de la célébration 40 mille francs, et 20 mille francs après la mort des père et mère. Dès que ma mère eut entendu de quoi était formée la constitution de la dot, sachant parfaitement quelles sont mes intentions à cet égard, elle répondit très honnêtement à l’ambassadrice que je n’avais que 22 ans et très peu de volonté de me marier dans le moment; que d’ailleurs j’allais entreprendre quelques voyages, celui de Paris d’abord, ensuite celui d’Italie (notez ce dernier); qu’ainsi elle était très sensible à la bonté des personnes qui voulaient bien jeter les yeux sur moi, mais qu’elle les priait de penser à quelqu’un autre. On ne lui nomma pas les parents de la demoiselle; on se contenta de lui dire qu’elle n’était pas d’Aix et qu’elle était d’une famille de mezzi cavalieri. Jugez comme tout cela me convenait: 40 000 francs à moi qui en veux au moins 150 000 francs. Et la mezzo cavalière, cadre-t-il, croyez-vous, avec mes idées? S’il ne se présente jamais d’autres marchés que de pareils à celui-là, j’ai tout peur de mourir puceau; passez-moi le terme.

Lettre à son père, le 18 janvier 1805

L’argent et la conscience de son aristocratie faisaient du jeune Eugène un prisonnier. Quelle est grande la grâce transformante de Dieu: c’est elle qui le rendra libre.

FRENCH

“L’avidité est une fosse insondable qui épuise la personne dans un effort sans fin pour satisfaire son besoin sans jamais atteindre la satisfaction.”    Erich Fromm

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1 réponse à VOUS POUVEZ IMAGINER QUEL INTÉRÊT J’AVAIS DANS TOUT CELA

  1. Denyse Mostert dit :

    Lettre à son père, le 18 janvier 1805

    Je n’ose y croire… L’image d’un « souk », lieu de transactions tenaces comme on en trouve notamment en Arabie, me vient directement à l’esprit devant ce passage de la lettre d’Eugène à son père.

    N’est-ce pas ce qui se passe à Aix où Marie-Louise Joannis fait la chasse à la riche héritière ? Une vraie braderie ! Quelqu’un se présente au domicile des de Mazenod ! On mentionne comme en passant que la demoiselle est « remplie de bonnes qualités », qu’elle est étrangère à Aix, qu’elle appartient à une famille de « mezzo cavalieri » ( signification inconnue pour moi) pour ensuite tracer de long en large les argents qu’elle pourrait apporter en dot.

    Marie-Louise est prise au piège. Connaissant les exigences de son fils, elle se doit de décliner l’offre. Eugène raconte à son père : « Elle répondit très honnêtement à l’ambassadrice que je n’avais que 22 ans et très peu de volonté de me marier dans le moment; que d’ailleurs j’allais entreprendre quelques voyages, celui de Paris d’abord, ensuite celui d’Italie (notez ce dernier); qu’ainsi elle était très sensible à la bonté des personnes qui voulaient bien jeter les yeux sur moi, mais qu’elle les priait de penser à quelqu’un autre. »

    « Qu’en termes élégants ces choses-là sont dite », aurait pu remarquer Molière ! Il n’empêche qu’à la place d’Eugène, j’aurais mal pris l’ingérence d’une mère sur un avenir dont j’aurais à porter les conséquences. D’un autre côté, ces refus ne cadrent-ils pas avec sa façon désinvolte de conclure : « S’il ne se présente jamais d’autres marchés que de pareils à celui-là, j’ai tout peur de mourir puceau; passez-moi le terme » ?

    Une chose est certaine, aucune trace de coup de foudre dans tout cela. Le cœur d’Eugène demeure disponible pour un destin encore inconnu de lui à ce moment-là.

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