ÊTRE FRANC AVEC LE PAPE

Quand j’eus fini de parler, il reprit le discours et parla à son tour fort au long sur ce même sujet. On aurait dit qu’il voulait s’excuser de ce qu’il ne faisait pas d’un trait de plume ce que savais bien qu’on n’accorde qu’après de longues formalités. «Vous savez, me disait-il, en me parlant toujours à la troisième personne, quels sont les usages du Saint-Siège. On fait aujourd’hui comme on a fait il y a cent ans.» Et alors il entra dans tous les détails pour me faire savoir comment les choses se passeraient. « Le Secrétaire de la Congrégation me fera un rapport de la chose, je choisirai un Cardinal pour l’examiner, il fera à son tour un rapport de l’affaire à la Congrégation, chaque Cardinal donnera son vote, etc.

Après avoir expliqué le processus, le Pape informa Eugène qu’on n’approuvait pas de nouvelles coongrégations mais qu’on « allait les louer et les encourager » dans leur bonne œuvre.

La multiplicité de ces demandes, qui nous viennent surtout de la France, a fait adopter un mode particulier d’approbation à la Congrégation, qui consiste à louer, à encourager, sans approuver formellement.»

Ce n’était pas ce pourquoi Eugène était venu et avait œuvré si fort pour tenter de l’obtenir, et aussi, avec son enthousiasme provençal, il éclaircit son opinion :

Je ne craignais pas de manifester au Saint-Père que ce mode-là ne me satisferait pas, et j’osais espérer qu’on ferait quelque chose de plus pour nous.

Lettre à Henri Tempier, 22 décembre 1825, EO VI n 213

 

« À bout de persévérance l’escargot a atteint l’arche. »     Charles Spurgeon

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1 réponse à ÊTRE FRANC AVEC LE PAPE

  1. Denyse Mostert dit :

    22 décembre 1825 – Lettre à Henri Tempier

    Rien ne se décide rapidement au Vatican. En dépit de l’attitude favorable de Léon XII l’approbation de la Congrégation n’est pas chose faite. « Vous savez, dit le Pape à Eugène, quels sont les usages du Saint-Siège. On fait aujourd’hui comme on a fait il y a cent ans. »

    Et d’expliquer comment la supplique devra passer par bien des échelons hiérarchiques. Que l’unanimité se fait rarement de but en blanc. Et que, de cardinal en cardinal, le rapport final peut prendre un certain temps avant de lui être soumis.
    En dépit de l’impatience bien légitime d’Eugène de Mazenod, quelque temps de plus ou de moins ne devrait être qu’un moindre mal. Mais que dire de ses sentiments lorsque le Pape lui explique que les trop nombreuses demandes, surtout de France, ont « fait adopter un mode particulier d’approbation à la Congrégation, qui consiste à louer, à encourager, sans approuver formellement.» Une douche froide après l’attitude chaleureuse du Souverain Pontife !

    C’est là que le Fondateur va donner toute sa mesure. Sans crainte, il exprime son insatisfaction pour un tel mode de louanges et d’encouragement. Ce qu’il désire c’est « quelque chose de plus » pour les Missionnaires Oblats de Marie Immaculée.

    Tout comme je l’ai fait à la lecture de ce passage de la lettre du 22 décembre 1825, Henri Tempier a dû passer lui aussi par toute une gamme d’émotions dont la dernière doit être de l’admiration pour l’audace de son ami. Audace soutenue par une confiance sans faille en la vocation de ses missionnaires. En effet, pour « faire connaître et aimer Jésus Christ » dans un climat de sécurité, ne leur faut-il pas mettre tous les atouts de leurs côté ?

    On a souvent écrit d’Eugène qu’il était « audacieux pour l’Évangile ». Une audace à nous souvenir quand une timidité mal placée vient nous empêcher d’exprimer clairement notre pensée…

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